Institut Universitaire Elie Wiesel

Journée d’études autour de l’œuvre littéraire d’Elie Wiesel

Séminaire de recherche

Journée d’études autour de l’œuvre littéraire d’Elie Wiesel

Proposée par l’Institut universitaire d’études juives Élie Wiesel et la « Luxembourg School of Religion & Society », en collaboration avec l’Elie Wiesel Research Center (Université de Tübingen, Université de Potsdam), une journée d’étude sur l’œuvre littéraire d’Elie Wiesel accueillant des chercheurs internationaux avait lieu le mardi 25 avril 2023 à Paris.

 

Avec visuel fourni/légende :
Des chercheurs internationaux pour évoquer les écrits d’Elie Wiesel.

Photo. : DR.

 

Cette journée d’étude, coordonnée par l’historienne Sandrine Szwarc, s’intéressait à l’œuvre littéraire d’Elie Wiesel, et en particulier à ses premiers romans, dans une perspective interdisciplinaire. Il s’agissait d’appréhender ses écrits selon des regards et des approches plurielles, dans le but d’en saisir la complexité, et de renouveler la réception littéraire de cette œuvre qui demeure peu étudiée.

Après que les mots d’ouverture du doyen de l’Institut Elie Wiesel, Franklin Rausky, de Jean Ehret, directeur de la Luxembourg School of Religion & Society et de Reinhold Borchki de l’université de Tübingen ont été prononcés, le déroulement de la journée a été présentée par Sandrine Szwarc.

Le parcours d’Élie Wiesel (1928-2016), éclaireur de conscience, explique l’élaboration de sa pensée. Témoin de l’échec de la modernité incarné par la Shoah, à son œuvre de romancier et de poète répond sa réflexion, trop souvent éludée, d’un intellectuel juif à la formation complexe : mosaïque et universelle, talmudique et philosophique. Les étapes de sa vie sont à cet effet éclairantes. De son enfance hassidique passée dans le shtetl de Sighet disputé entre la Hongrie et la Roumanie, il conserva un amour sans borne pour le Talmud, le goût des commentaires sans fin et de la parole des sages dans laquelle il a été bercé. De l’horreur concentrationnaire et de la perte de nombreux membres de sa famille (notamment ses parents et sa petite sœur) dont témoigne La nuit, a émergé un nouvel Élie Wiesel. Il a parachevé sa formation grâce à l’OSE qui l’accueillit avec « Les enfants de Buchenwald » en France et lui permit de suivre des études de philosophie à la Sorbonne. Il questionna sa foi de l’intérieur même de sa foi dont il ne pouvait se défaire par fidélité à ses aïeux : une ambivalence qui s’exprime pleinement dans son œuvre. Ce doute a résonné chez de nombreux survivants qui se sont reconnus dans ses questionnements, et a fasciné bien des lecteurs. Devenu citoyen américain, Élie Wiesel devint alors le modèle d’une conscience juive universelle dont les enseignements à tirer d’une vie chahutée étaient multiples. Il démontra notamment la vocation juive à éclairer la conscience occidentale. « Plus le juif est juif, et plus il sert ceux qui, autour de lui, ne le sont pas », dira-t-il notamment au Colloque des intellectuels juifs de langue française. Il y explicita également la signification de l’échec de la modernité incarnée par la Shoah : « Les chrétiens ont tué leur dieu en voulant tuer le juif. En tuant des Juifs, l’humanité a tué plus que des Juifs ; l’holocauste a marqué plus que ses victimes ; en un certain sens, la société s’est donné la mort à Auschwitz. ».

« Retisser dans les décombres une identité juive blessée. Ecriture et résilience chez Elie Wiesel» était le thème de la conférence introductive d’Anny Dayan-Rosenman. Les œuvres complètes d’Elie Wiesel sont actuellement traduites en allemand ont été présentées par Julien Jeusette et Elisabeth Migge. Ensuite, plusieurs thématiques abordant des facettes différentes des écrits du Prix Nobel de la Paix ont été détaillés avec les communications de  : Sandrine Szwarc, « La littérature d’Elie Wiesel entre passé et présent :  la figure du fou et du savant incarnée par M. Chouchani » ; Myriam Dahan, « Les dimensions symboliques de la nuit » ; Guila Clara Kessous, « Théâtre et sacré dans l’œuvre d’Elie Wiesel » ; Gaelle Anna Serero : « La lecture biblique inachevée d’Elie Wiesel » ; Ana M. Alves, « La mémoire dans l’univers d’Elie Wiesel » et  François-Jean Authier, « Démence, folie et paroles dans La Ville de la chance d’Elie Wiesel : les larmes de Moishe ». La conférence de clôture était proposée par Daniel Krochmalnik de l’Université de Postdam sur le hassidisme et l’œuvre d’Elie Wiesel.

Pari réussi pour relancer les études autour de l’œuvre d’un écrivain majeur du XXe siècle.

Julie Lewin